L'actualité du Conseil National de la Résistance

Publié le par PCF 67

Intervention de Georges Monsonego

 

Depuis quelques mois, de nombreux articles, appels, pétitions, émanant de personnalités de gauche les plus diverses et se référant au Conseil national de la résistance et à son programme attestent de son actualité.


    Le CNR est né du mouvement national de lutte contre le nazisme, l’Etat vichyste, pour l’indépendance de la France. C’est un rassemblement inédit, une première dans l’histoire de France, rassemblant côte à côte des hommes et des femmes d’origine sociale différente, ayant des conceptions philosophiques, une conception de la société française et de son avenir différentes. Le CNR regroupait toutes les forces vives de la nation : huit mouvements de résistance, les deux grandes centrales syndicales de l’époque, CGT et CFTC, et six représentants des principaux partis politiques reconnaissant la France Libre (PCF, SFIO, Radicaux, Démocrates Chrétiens, Droite Républicaine.


    C’est cette fusion intime entre lutte armée, luttes politiques et luttes sociales qui à permis au CNR de se doter d’un programme qui n’était pas seulement la restauration de la situation d’avant-guerre, mais dont le contenu constituait une grande avancée de civilisation. Voilà un sujet de réflexion actuel pour sortir des logiques écrasantes que nous vivons.


    Un premier projet fut présenté par Pierre Villon, membre du Comité Central du PCF et président du CNR au mois de mai 1943 et ce fût le grand mérite de Jean Moulin de l’avoir enrichi et d’y avoir fait rallier les mouvements de résistance gaullistes. Ce programme se donnait pour objet la construction d’une nouvelle société , de solidarité, d’égalité, de bien-être pour tous, fondée sur la démocratie et la laïcité. Voilà bien des aspirations fortes présentes dans les luttes actuelles (retraites, services publics, etc..). Ce programme   exige l’éviction des féodalités financières de la direction de l’économie, le retour à la nation des grands moyens de production, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurance et des banques. Ce programme témoigne aussi de la conscience du CNR que le nazisme, le vichysme, le racisme n’étaient pas nés de rien, mais que leurs terreaux communs résidaient dans la trahison des élites politiques et économiques (« plutôt Hitler que le Front Populaire », la collaboration du Comité des Forges ancêtre du Medef).


    Ce programme a constitué le socle du modèle social français ; il a irrigué en profondeur notre société de 1945 à la fin du 20ème siècle. Bien sûr, tout ne fût pas réalisé(le plan Langevin-Wallon pour l’éducation ne fût jamais appliqué) , bien sûr il a subi l’érosion du temps sous les coups successifs de gouvernements de différentes majorités. Même rognés, il en est resté jusqu’en 2007 des acquis sociaux importants (Sécurité Sociale, retraites, statut de la fonction publique, nationalisation de secteurs industriels) auxquels on peut associer les noms de ministre Ambroise  Croizat, Maurice Thorez, Marcel Paul .

    Après les élections présidentielles de 2007, Denis Kessler, ex vice patron du MEDEF, a parfaitement résumé le programme présidentiel : adieu à tous les acquis sociaux  issus du programme du CNR, les démanteler. Avec le recul, cela a conduit à multiplier les privatisations, à asservir les médias aux puissances de l’argent, à laminer les services publics. Ainsi en ce qui concerne l’Education, il y aura à la rentrée prochaine suppression de 9000 postes d’enseignants, fermeture de 1500 classes et coupes drastiques dans les budgets de l’éducation nationale, alors que la France a le plus faible taux d’encadrement de tous les pays d’Europe.


    La raison de cette destruction systématique de cet héritage est qu’il constituait un obstacle pour introduire en France, au détriment des salariés, le crédo de l’Union Européenne : le tout marché, la dérèglementation , la concurrence libre et non faussée, la marchandisation généralisée (y compris celle du vivant )


    L’exemple de la Sécurité Sociale, loi élaborée et présentée par Ambroise Croizat, un des quatre ministres communistes de l’époque est révélateur des avancées réalisées par rapport à la situation antérieure. En effet, auparavant, les assurances sociales étaient gérées par 1093  caisses autonomes ne couvrant qu’un tiers de la population de façon incomplète. Il est bon de rappeler que cette loi reposait sur 4 principes :

1)    L’universalité soit une couverture sans exclusive de l’ensemble de la population vivant sur le sol français.

2)    La solidarité entre générations, entre actifs/non actifs, entre malades/bien portants

3)    L’unicité soit une institution unique couvrant tous les risques sociaux : maternité, primes prénatales et allocations familiales, maladies, accidents du travail, retraite, vieillesse.

4)    La démocratie avec une gestion directe par les interessés soit 75% se sièges aux salariés et 25% au patronat


Cette loi ne passa pas sans luttes sociales et politiques intenses : refus des patrons de payer une cotisation, refus des médecins de se plier à des tarifs fixés à l’avance. Ces forces conservatrices trouvaient des alliés non seulement à l’Assemblée Nationale mais au sein du gouvernement pour essayer de limiter l’ambition de cette loi.

    De plus, on doit aux retombées concrètes du programme du CNR, d’avoir permis des avancées dans le statut de la femme dans notre société ; ce fait est très significatif non seulement parce qu’il est en soi une mini révolution mais aussi parce que,  curieusement, cette avancée est très rarement mentionné dans les apports du CNR. En effet, avant 1945, les femmes n’existaient pas au plan politique. L’idéologie de la droite, imprégnant profondément la classe ouvrière, réduisait le statut de la femme à celui de femme au foyer, de citoyenne de seconde zone, dont la fonction principale était l’éducation des enfants. Le rôle important joué par les femmes dans la résistance conduisit naturellement le CNR à réparer cette injustice faite aux femmes en leur donnant la reconnaissance, à égalité avec les hommes, d’un statut de citoyenneté par le droit de vote. Cet aspect peu connu ou oublié du programme du CNR méritait d’être rappelé  à un moment où le combat pour l’émancipation des femmes est d’une brûlante actualité et ne saurait être dissocié des combats contre la casse des acquis sociaux.


    Les idées d’indépendance nationale, de souveraineté populaire, de liberté, issues du CNR, et qui restent vivaces dans notre mémoire collective, risquent d’être complètement laminées. En effet dans le silence et le secret des instances européennes, un dangereux scénario a été écrit par Angela Merckel et Nicolas Sarkozy. Ce scénario a pour titre  « Pacte pour l’Euro+ « . De quoi s’agit-t-il ? Ce pacte se donne pour objectif de réduire les déficits des Etats de la zone Euro. Pour cela, les budgets de ces Etats seront cadrés et agrées par Bruxelles. Cela veut dire qu’il y aura abandon de souveraineté populaire avec aggravation de la crise de représentativité. Les Parlements nationaux ne seront pas libres de voter les investissements  et les budgets sociaux. Le cœur du projet pour réduire les déficits se trouve dans l’obsession affirmée et écrite d’abaisser par tous les moyens le coût du travail par une surexploitation de la population. Comme si ce n’était pas suffisant, il est prévu pour celle-ci la double peine : augmentation des impôts et des cotisations sociales pour les salariés, les chômeurs, les retraités, des restrictions de droit d’accès à la santé et aux services publics tandis que les cadeaux aux plus fortunés continueront de creuser les déficits et d’aggraver la crise économique et sociale.


    Pour revenir en France, comment Sarkozy et l’UMP préparent-t-ils les prochaines échéances électorales ? Ils sont en train de concocter en grand secret un programme dont le nom de code est "PNR 2011/2013" soit  Programme National de réformes. Ce programme est une version francisée du Pacte de l’Euro+. Il se propose de dynamiter tous les acquis sociaux de 1945, plus précisément ce qu’il en reste et d’en finir une fois pour toutes avec les idéaux de progrès social. Pour parvenir à cette destruction, Nicolas Sarkozy et son Ministre de l’Intérieur, s’efforcent, jour après jour, dans une campagne de concurrence-promotion de l’extrême droite d’y substituer la xénophobie, l’islamophobie, la haine de l’autre.


   Nous savons donc ce qui nous attend : le passage de l’austérité à l’hyperaustérité, accompagnée d’une politique migratoire et d’une chasse au faciès légitimées par des lois de plus en  plus liberticides. Le dilemme est le suivant : ou bien l’abandon de toute ambition sociale et démocratique, ou bien s’inspirer des valeurs du CNR en créant, tous ensemble, les conditions d’une rupture avec la domination écrasante des marchés financiers.


                                                                       Georges Monsonégo

Publié dans LUTTEZ

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M
<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> L’intérêt que vous manifestez pour le Conseil National de la Résistance<br /> <br /> <br /> nous conduit à vous signaler le blog :<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />                      http://unmotdejeanmoulin.hautetfort.com<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Il vous donnera l’élément historique essentiel et plutôt stupéfiant qui est<br /> <br /> <br /> au cœur de l’ouvrage que nous avons publié en 1995 sur les raisons<br /> <br /> <br /> profondes de l’élimination physique de Jean Moulin en 1943.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Très cordialement,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Michel J. Cuny  - <br /> Françoise Petitdemange<br />
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